lundi 13 décembre 2010

Science fiction





Au moulin, chacun attend sa bassine de mil



L'empêcheuse de tourner en rond...

A ma droite, Alain Rabot. Alain Rabot, membre de l'association de la maison des projets de Koudougou. Avec Pascal, il échange autour de Gide, Rousseau, Vian et beaucoup d'autres. C'est un être incroyablement serein, une force tranquille pourrait on dire. Tout ce dont j'avais besoin après de difficiles moments au village de Bissanderou.
Bissanderou, on y reviendra donc...
A Koudougou toujours, les NAK (nuits atypiques de Koudougou) vous offre le meilleur comme le pire. Musiques et danses traditionnelles de qualité, variétoches en playback, on se serait alors cru au Matata, la boîte de Ouaga où séjourne chaque soir une brochette de prostitués. Le vendredi, ils nous ont resservi leur périmètre de sécurité, idem à celui de Bobo Dioulasso pour la SNC.
Le militaire, son béret et ses gros godillons, ben, ça ne donne pas envie de se trémousser.
Est ce parce que l'événement est formel, institutionnel, qu'on a plus de chances de tomber dans ces travers? Alors, il faudrait sans répit chercher les off, les apparté, les inattendus, les coups de chances comme le suggère Simon?
Fort heureusement, il y a parfois des lieux qui vous surprennent. Anol, artiste camerounais vivant à Koudougou, exposait toute la semaine dans un cadre verdoyant, non loin du baobab du bourreau -faut réviser les précédents épisodes!-
Il y a la peinture du prisonnier, la sculpture du berger et des tas de choses que j'aimerai acheter!
Et, mue par un consumérisme effrénée ce week end, j'ai lorgné sur les pagnes du marché. Accompagnée d'Augustine qui sillonne les allées en habituée et salue de nombreux commerçants, je me laisse entraîner dans ce labyrinthe que j'apprivoise petit à petit (bili-bilifou).
Koudougou, c'était aussi l'occasion d'y recroiser Arben, un catalan qui réalise un espace tout public, bibliothèque et patio au coeur de la cité universitaire. Je l'avais laissé le jour de Tabaski -mais révisez donc vos épisodes! - et il a suivi avec beaucoup d'intérêt l'égorgement du mouton. Arben, c'est quelqu'un qui est venu à plusieurs reprises au Burkina, alors forcément il commence à connaître du monde. La question est donc la suivante : est-ce que je m'incruste à la fête du 31 chez Monsieur le Maire de Koudougou? Sociologiquement parlant, c'est défendable... Si toutefois je m'emm... de trop, j'irai guincher avec Félicité après avoir mangé le poisson grillé sauce vinaigrette chez Waguess - fichtre, révisez vos fiches! -Félicité, ton tô sauce « fleur d'oseille », c'était bien bon ce matin, même si il n'était que 9h00 (les élèves disent neuf heures zéro, zéro). Je m'égare un peu là. J'en n'avais pas fini avec l'ami catalan. Je lui parle du conteur Bobolais, il surrenchérit en parlant d'un conteur Koudougoulais. Mais pas n'importe lequel voyez vous. Le petit frère de Norbert Zongo, le journaliste assassiné- pour des raisons évoquées dans vos fiches à réviser - et pour lequel on devrait manifester aujourd'hui, mais bon, entre la fête du cinquantenaire de l'indépendance et les stands du NAK, le divertissement ne laisse pas grande place à la rébellion (avez vous pensé à respirer en lisant cette phrase périlleuse?).
Et au village, tout va bien me demande t-on? Les gens de Bissanderou?

Côté jardin :
Ah! Bissanderou. Le village, jusqu'à présent, vous accueille avec de magnifiques arbres centenaires qui ont coûté des efforts faramineux aux anciens du village et dont on aime encore aujourd'hui faire le récit.
Ces arbres, bientôt, ne seront plus. On bitume la route de Dédougou à Koudougou. Déjà, des cadavres s'amoncellent dès Tchériba -mais peut être vous en ai-je parlé dans les épisodes précédents que vous connaissez maintenant par coeur-
Là où l'on sert le dolo les jours de marché, là où stationnent les cars, là où se devine l'une des pompes du village, il n'y aura plus. Compaoré Blaise, as tu pensé à ta prochaine campagne électorale? Sur quoi vas tu placarder tes affiches de gendre idéal? Ah oui j'oubliais, il reste la kyrielle de tee-shirts que tu distibues, publicité ambulante pré et post électorale.
N'aurait-on pas pu envisager un autre tracé, une autre route? Ça désole certains, d'autres se taisent. On paie grassement pour éviter les contestations. On parle reboisement qui, si il a lieu, aura débuté trop tard. Je vais probablement assister au désastre, bouillir de colère ou pleurer des larmes de caïmans sacrés...
Côté cour :
Bissanderou, son école, ses élèves. Près de trois mois que je tourne dans les classes et ajuste mes interventions en fonctions des besoins, ceux des enseignants et les miens.
Il faut être honnête en terre des hommes intègres : ça grince fort entre l'institution et ma pomme.
Il y a eu mon statut, peut être mal défini dès le départ. Je me suis présentée comme enseignante donc sujette à être récupéree par l'éducation nationale (qui ne mérite pas ses majuscules). On a voulu que je participe aux stages et conférences de circonscription, conseils et rendez-vous pédagogiques de toute nature. Si j'imaginais ces temps constructifs, j'aurai sûrement sacrifié quelques samedis matins. Mais je sais maintenant l'équipe habituée à suivre des méthodes très procédurières et peu enclin aux innovations pédagogiques. La faute est sûrement partagée : la formation à l'ENEP (l'école de formation des maîtres), les inspecteurs suspicieux dit-on, devant toutes modifications, le manque d'initiatives et de motivation de certains. Eux mêmes ont des excuses :
Il y a les fournitures d'usage que promettait l'Etat et qui ne sont toujours pas remises aux élèves. Ben oui, on ne livre pas les cahiers parce que le logo du cinquantenaire n'est pas encore apposé...
Le salaire de l'enseignant n'encourage pas non plus à s'investir jour et nuit pour son boulot.
Alors, je me suis tue devant la léthargie ambiante. J'ai aménagé un emploi du temps de sorte de ne pas brusquer les enseignants dans leurs journées pré-définies. J'ai crée quelques affichages de classes, mis à disposition des fiches de lecture, un outil à réadapter mais un outil tout de même.
Je suis restée classique, version syllabique mais j'ai voulu sensibiliser sur l'intérêt de diversifier les exercices, de proposer une palette de jeux de lecture avec discriminations visuelles, auditives et tout ce que Maître Gabarro m'avait enseigné durant mes deux années de C.P.
Donc, moins de mécanique et plus de compréhension. Je n'ai pas senti l'enthousiasme mais me restait la possibilité de prendre les non lecteurs de chaque classe et de tenter quelque chose, à ma façon. Certains ont approuvé. On a donc recensé 8 CE1, 12 CE2 et 6 CM2 pouvant bénificier d'une heure quotidienne de soutien en lecture.
Mais il y a des hics. Les petites classes restent méfiantes, j'ai donc choisi de ne pas insister.
Le maître de CM1, quand à lui, n'a pas digéré ma prise de position-voir le précédent épisode puisque vous oubliez tout bande de cancres!- Et il n'a toujours pas compris qu'un môme se doit d'aller manger à 12h00 après quatre heures de classe plutôt que d'aller laver son linge ou monter son mur de briques! Et ceux avec l'assentiment du directeur qui dénonce peu, autrement dit rien.
Je me suis ressourcée ce week end mais l'usure morale me guette. J'ai donc décidé de limiter mes interventions au centre d'accueil les jeudis et sur les temps d'inter-classes, entre 12H30 et 14H30 les autres jours. Le point positif, c'est que je peux créer des espaces permanents. Reste à voir la disponibilité des enfants sur ces créneaux. Et je reviens à mon objectif premier : diffuser quelques éléments de la pédagogie Freinet à travers la communication orale et écrite.
J'ai trouvé deux beaux puzzle en bois au NAK, l'un du Burkina, l'autre de l'Afrique. Et je devrais me procurer de nouveaux albums à Bobo pendant les congés de Noël. Ça change des manuels scolaires...
Tout ça est formateur me direz-vous. Certains penseront que je juge avec un regard de blanche qui ne laisse pas au pays le temps d'améliorer certains points. Que nous pratiquions la même chose il n'y a pas si longtemps.
Mais si il n'y a pas d'acteurs sociaux, autrement dit nous, blancs, noirs ou violets qui mènent aux changements, qui sera moteur de l'Histoire? Ceux qu'on appellent les Grands Hommes? Non, assurément.
Je n'ai pas la prétention de changer grand chose dans le quotidien de Bissanderou. Toutefois, je refuse les oeillères si fortement recommandées par mon entourage ces derniers jours.
Merci aux villageois de me donner l'envie de poursuivre. Merci Kiemtoré de faciliter les échanges. Merci Abel de m'aider à poursuivre les couchers de soleil. Merci à ceux qu'on nomme enfants.
Les personnes nommées se reconnaîtront et oui, il existe des personnes violettes, j'ai un net souvenir d'une page dans mon album Panini des Schtroumpfs : ils deviennent tous un peu dingos,irrascibles et violets.



Promenons nous dans les bois...































Il y a deux mois !!!


Moussa : gardien; ange gardien...


Leçon de cuisine des CM1 ou comment on prépare le riz sauce...